Écrire Un militant bidun condamné en appel

Le 31 janvier 2024, une cour d’appel koweïtienne a déclaré Mohammad al Barghash, un défenseur des droits de la communauté apatride bidun du Koweït, coupable de diverses charges, dont la « diffusion de fausses informations » et l’a condamné à trois ans de prison après qu’il a donné une interview sur la situation des bidun à une chaîne étrangère.

Un tribunal de première instance l’avait relaxé le 25 octobre 2023, mais le ministère public avait interjeté appel.

En cas d’application de sa peine, nous le considérerons comme un prisonnier d’opinion.

Mohammad al Barghash est un défenseur des droits humains appartenant à la communauté bidun (apatride) du Koweït. Il diffuse régulièrement sur les réseaux sociaux des publications concernant la situation difficile des bidun, organise des forums de discussion en ligne entre les bidun et leurs sympathisant·e·s, et participe à des manifestations pacifiques en faveur des droits des bidun. En mai 2022, il a fondé le Bloc national des bidun koweïtiens, qui regroupe des militant·e·s défendant collectivement les droits des bidun au Koweït.

Mohammad al Barghash était l’un des organisateurs d’une manifestation bidun qui a eu lieu le 26 août 2022 et figurait parmi les 21 hommes arrêtés et poursuivis pour avoir participé à cette manifestation pacifique. Il a été libéré le 15 septembre 2022 et condamné à une amende de 200 dinars (environ 650 dollars des États-Unis) et à une peine d’emprisonnement d’un an avec sursis.

Les forces de sécurité étatiques ont arrêté Mohammad al Barghash le 3 septembre 2023, après qu’il a critiqué, sur les réseaux sociaux et dans une interview accordée à une chaîne de télévision le 12 août 2023, l’arrestation arbitraire de Fadhel Farhan Saket (également appelé Abu Turki), un autre militant bidun et membre du Bloc national des bidun koweïtiens. Abu Turki a été arrêté le 10 août 2023 en raison de ses publications sur les réseaux sociaux. Libéré sous caution le 31 août, il est encore mis en cause dans un certain nombre d’affaires liées à son militantisme en ligne, en vertu de la Loi relative à la cybercriminalité.

Le Koweït compte depuis longtemps une population apatride, les bidun, qui se trouve dans ce pays depuis l’indépendance en 1961. Les enfants de la première génération sont aussi nés apatrides.

La population bidun est estimée à environ 100 000 personnes, soit environ 10 % de la population nationale reconnue. L’apatridie des bidun a été perpétuée par la loi koweïtienne sur la nationalité, qui ne reconnaît pas comme citoyen·ne·s les enfants de parents apatrides nés au Koweït ni les enfants de mère koweïtienne et de père étranger. Elle est également le résultat de décisions officielles faisant obstacle à la naturalisation. Des décisions judiciaires ont empêché encore davantage les bidun de demander réparation pour leur apatridie et d’obtenir la nationalité koweïtienne.

Aujourd’hui, les bidun entrent dans de multiples catégories qui correspondent à des documents officiels et des statuts juridiques de différents niveaux.

Les enfants nés apatrides sont confrontés à un degré accru d’incertitude juridique et à un risque plus élevé de violations des droits humains. Ceux nés dans des familles bidun dépourvues du statut officiel de résident·e·s se voient délivrer un certificat de naissance à l’hôpital, mais pas d’acte de naissance définitif et officiel de la part du ministère de la Santé. Or il est obligatoire de disposer d’un acte de naissance pour obtenir un numéro d’identification civile auprès de l’administration publique de l’état civil, essentiel pour accéder à la plupart des services, y compris les soins de santé et l’éducation.

En avril 2021, le gouvernement a approuvé des modifications relatives au Code de procédure pénale, notamment l’ajout d’un paragraphe à l’article 69, selon lequel les dispositions relatives à la détention provisoire ne s’appliquent en aucun cas aux personnes ayant exercé leur droit d’exprimer publiquement leur opinion verbalement, par écrit, sous forme de dessin ou par d’autres moyens, notamment dans les médias ou sur les réseaux sociaux.

L’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), auquel le Koweït est un État partie, garantit à tous et toutes le droit de ne pas être inquiété·e pour ses opinions et le droit à la liberté d’expression, en précisant que celui-ci englobe le droit de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considération de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de son choix.

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