Écrire Dix égyptiens nubiens condamnés à des peines de prison

Le 10 octobre, le Tribunal pénal spécial de Riyadh, la capitale de l’Arabie saoudite, a condamné 10 Égyptiens nubiens à des peines de 10 à 18 ans de prison, à l’issue d’un procès manifestement inique, pour avoir organisé une commémoration pacifique. Ils étaient accusés d’avoir créé une association sans autorisation, manifesté de la solidarité à l’égard des Frères musulmans et publié certaines informations sur les réseaux sociaux.

Certains de ces hommes sont âgés et ont des problèmes de santé, notamment du diabète et des troubles cardiovasculaires. Les autorités saoudiennes doivent libérer ces 10 Égyptiens nubiens dans les meilleurs délais et sans condition, annuler leur peine et abandonner toutes les charges à leur encontre.

Dans l’attente de leur libération, elles doivent veiller à ce qu’ils aient pleinement accès à des soins de santé et à ce qu’ils puissent contacter librement leur avocat et communiquer régulièrement avec leurs proches.

Ces 10 hommes ont été arrêtés le matin d’un événement qu’ils avaient prévu d’organiser le 25 octobre 2019 pour commémorer la guerre israélo-arabe de 1973. Des membres des forces de sécurité saoudiennes les ont interrogés, en leur reprochant de ne pas avoir mis la photo du président égyptien, Abdel Fattah al Sissi, sur l’affiche annonçant l’événement, aux côtés d’autres généraux de l’armée égyptienne. Le 25 décembre, les hommes ont été libérés, avec interdiction de quitter le territoire dans l’attente des suites de la procédure. L’événement en question s’était déroulé les années précédentes en Arabie saoudite sans représailles contre la communauté nubienne.

Les 10 Égyptiens nubiens détenus sont : Adel Ibrahim Faqir (chef de la communauté nubienne de Riyadh), Farjallah Ahmed Youssef (ancien chef de la communauté nubienne de Riyadh), Jamal Abdullah Masri (président de l’Association du village nubien de Dhamit, à Riyadh), Mohamed Fathallah Gomaa, Sayyed Hashem Shater, Ali Gomaa Ali Bahr, Saleh Gomaa Ahmed, Abdulsalam Gomaa Ali Bahr, Abdullah Gomaa Ali et Wael Ahmed Hassan Ishaq (membre de l’Association du village nubien de Thomas).

Le Tribunal pénal spécial a condamné Mohammad Fathallah Gomaa à 18 ans de prison, Farjallah Ahmed Youssef à 17 ans de prison, Adel Ibrahim Faqir à 14 ans de prison et Sayyed Hashem Shater à 14 ans de prison. Les six autres hommes ont été condamnés à des peines de 10 à 16 ans de prison.

L’ethnie nubienne est un groupe minoritaire en Égypte et au Soudan. Ses membres sont depuis longtemps marginalisés et victimes de discrimination en raison de leur identité culturelle, ethnique et linguistique. En 1964, le gouvernement égyptien a chassé des milliers de Nubien·ne·s de leurs terres dans le sud de l’Égypte pour construire le barrage d’Assouan, qui a causé l’inondation de plusieurs villages nubiens et entraîné d’autres déplacements.

La population nubienne déplacée s’est réinstallée dans d’autres régions. Une grande partie a migré dans les pays du golfe Persique, notamment en Arabie saoudite, pour chercher du travail. Pour préserver sa culture et son héritage, la diaspora nubienne a créé des associations culturelles et sociales. Pendant plusieurs décennies, les associations nubiennes ont fonctionné normalement en Arabie saoudite, se consacrant exclusivement à des activités culturelles et sociales, sans faire de politique.

Depuis le début des années 2000, cependant, les revendications de militantes et militants nubiens en faveur d’un retour sur leurs terres ancestrales et d’une indemnisation ont pris de l’ampleur. L’article 236 de la Constitution égyptienne de 2014 a prévu pour la première fois la mise en œuvre d’un plan de développement global pour les régions marginalisées, dont la Nubie, avec la participation des habitant·e·s locaux, en vue de préserver leur héritage. Une coalition de 40 associations nubiennes a été formée à Riyadh au début de l’année 2020 pour appeler le président égyptien, Abdel Fattah al Sissi, à appliquer l’article 236 et à permettre le retour des Nubien·ne·s sur leurs terres.

En 2017, les autorités égyptiennes ont arrêté 25 militants nubiens après que la police a violemment dispersé leur manifestation pacifique dans le gouvernorat d’Assouan le 3 septembre 2017. Ces militants ont par la suite été libérés et les poursuites à leur encontre abandonnées, mais l’un d’eux, Gamal Sorour, est mort en détention. Amnesty International a recueilli des informations faisant état d’un harcèlement permanent des militant·e·s nubiens des droits humains en Égypte par l’Agence de sécurité nationale, notamment au moyen de convocations pour des interrogatoires coercitifs sans décision de justice en 2021.
En outre, le Tribunal pénal spécial d’Arabie saoudite tient systématiquement des procès d’une iniquité flagrante qui aboutissent à des condamnations très sévères, dont des peines de prison allant jusqu’à 34 ans suivies d’interdictions de voyager tout aussi longues, et même des condamnations à mort. Cette juridiction est régulièrement utilisée comme outil pour réprimer l’opposition.

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