communiqué de presse

Pakistan. L’interdiction d’un grand réseau privé de télévision est une « atteinte à la liberté d’expression »

La suspension par le gouvernement pakistanais de Geo TV, principal réseau privé de télédiffusion du pays, est une attaque contre la liberté d’expression et les médias motivée par des considérations politiques, a déclaré Amnesty International.

« La suspension de Geo TV est une grave atteinte à la liberté d’expression au Pakistan. Elle est le dernier épisode en date d’une campagne organisée de harcèlement et d’intimidation visant ce réseau, perçu comme hostile à l’armée  », a déclaré Richard Bennett, directeur du programme Asie d’Amnesty International.

« Les autorités pakistanaises doivent annuler immédiatement cette interdiction. Si le contenu des émissions de Geo TV pose problème, les autorités doivent régler ce problème dans le respect des normes internationales relatives aux droits humains, et non uniquement en réduisant au silence cette voix critique. »

L’Autorité gouvernementale pakistanaise de régulation des médias (PEMRA) a décidé vendredi 6 juin 2014 de suspendre l’autorisation d’émettre de Geo TV pour 15 jours, avec effet immédiat.

Cette interdiction découle du fait que Geo TV – qui fait partie du groupe Jang – aurait diffusé des contenus blasphématoires en mai 2014, et a porté des accusations contre un haut responsable des services du renseignement militaire en avril.

Geo TV est en confrontation avec l’armée pakistanaise, des médias concurrents et certains partis politiques depuis qu’un de ses journalistes, le présentateur de journaux télévisés Hamid Mir, a échappé de justesse à une tentative d’assassinat à Karachi le 19 avril.

Le réseau a accusé les Services du renseignement de l’armée pakistanaise (ISI) d’être derrière cette attaque, ce qu’ils ont nié.

Le 20 mai 2014, des responsables gouvernementaux ont tenté, semble-t-il sous la pression de l’armée, de faire interrompre la diffusion des chaînes de Geo TV pour contenus « hostiles à l’État » et « blasphématoires », mais cette décision a été annulée dans les heures qui ont suivi par les instances dirigeantes de la PEMRA, jusqu’à la suspension prononcée le 6 juin.

« La suspension de Geo TV relève malheureusement d’une pratique bien trop courante au Pakistan. Les autorités gouvernementales et d’autres acteurs politiques cherchent par tous les moyens à réduire au silence les voix critiques, non seulement en utilisant les dispositions juridiques qui punissent les attaques contre l’État et la religion, mais aussi par des agressions physiques et des violences », a déclaré Richard Bennett.

Dans un rapport paru le 30 avril 2014, Amnesty International a décrit comment les professionnels des médias vivent dans la peur constante d’être harcelés, victimes de violences ou tués par divers agents de l’État et acteurs non étatiques.

Plusieurs journalistes travaillant pour le groupe Jang ont expliqué à Amnesty International qu’ils faisaient quotidiennement l’objet de menaces et de harcèlement de la part d’inconnus, par téléphone ou en face-à-face.

Beaucoup ont raconté qu’ils n’osaient plus se rendre à leur bureau ni se présenter comme travaillant pour Geo TV ou d’autres médias du groupe Jang par crainte d’être attaqués.

« Le paysage médiatique pakistanais, vivant et dynamique, mérite d’être mieux protégé, et les journalistes doivent pouvoir exercer leur travail légitime sans crainte ni ingérence extérieure  », a déclaré Richard Bennett.

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