Communiqué de presse

Nigeria. Des experts de la Banque mondiale tournent le dos à des habitants expulsés de force

La décision d’un panel d’inspection de la Banque mondiale de refuser d’enquêter sur une plainte en relation avec des expulsions forcées liées à un projet de cette institution internationale à Lagos dénote une indifférence totale face à ses responsabilités, a déclaré Amnesty International vendredi 18 juillet.

Jeudi 17 juillet dans la soirée, le panel d’inspection a annoncé la suspension du processus visant à trouver des solutions pour certaines des personnes ayant perdu leur logement en février 2013 lorsque quelque 9 000 habitants ont été expulsés de force d’un quartier informel de la zone de Badia-Est, à Lagos. Cette décision met fin à l’implication du panel dans cette affaire.

Les habitants concernés devaient bénéficier d’un projet financé par la Banque mondiale à Badia, ayant pour objectif de favoriser l’accès à des services de base, par le biais d’investissements dans des infrastructures telles que des systèmes d’évacuation des eaux. Mais près de 17 mois plus tard, ils se sont vu refuser des solutions de relogement et n’ont pas été suffisamment indemnisés pour le préjudice subi.

« Cette décision est plus que décevante - c’est un affront aux membres de la population de Badia-Est qui ont été expulsés de force et se sont retrouvés sans domicile pendant plus d’un an. Ce qui est particulièrement incompréhensible, c’est qu’elle a été prise après que les membres du panel ont rencontré les personnes touchées, pris connaissance de ce qu’elles ont traversé et vu la situation de leurs propres yeux », a déclaré Ashfaq Khalfan, spécialiste des droits économiques, sociaux et culturels à Amnesty International.

« Le Conseil exécutif de la Banque mondiale et le président de celle-ci, Jim Kim, doivent convoquer de toute urgence une réunion de l’exécutif afin de débattre de la décision du panel et d’assumer ses responsabilités vis-à-vis de la population de Badia-Est. »

Amnesty International estime, tout comme les résidents expulsés de force, que le plan de réinstallation conçu pour eux présente des lacunes, ne respecte pas les normes en matière de droits humains et n’est pas conforme à la politique de la Banque mondiale concernant les réinstallations involontaires. Il ne propose aucune solution de relogement ni de mesures concrètes visant à soutenir les moyens de subsistance, et a été élaboré sans que les représentants de la communauté ne soient véritablement consultés.

Plus d’un an après les expulsions forcées à Badia-Est, le gouvernement de l’État de Lagos a proposé une aide financière inadaptée, « à prendre ou à laisser », aux populations concernées. Elle était tout à fait insuffisante compte tenu des préjudices et des pertes subis, et la plupart des personnes touchées n’ont eu d’autre choix que de vivre dans des conditions précaires.

Deux des trois membres de cette population qui avaient initialement demandé à la Banque mondiale d’enquêter ont, par l’intermédiaire de leur avocat, publiquement fait part de leur extrême mécontentement au panel quant à l’aide financière fournie et au processus d’élaboration du plan de réinstallation.

Quarante-cinq autres habitants les ont soutenus, mais en refusant d’enquêter, le panel de la Banque mondiale n’a semble-t-il pas pris leur opinion en considération. Le panel a pourtant lui-même déclaré que beaucoup des personnes affectées qu’il avait rencontrées avaient déclaré que les sommes versées étaient totalement insuffisantes pour rétablir leurs moyens de subsistance.

Le panel est parvenu à cette décision dans le cadre d’un nouveau projet pilote qui vise à résoudre les problèmes des demandeurs avant de déterminer s’il convient de mener une enquête. Amnesty International demande l’ouverture d’une enquête indépendante sur la manière dont le panel d’inspection de la Banque mondiale a mené le projet pilote, ainsi que la suspension de ce dernier jusqu’à ce que l’enquête soit terminée. D’ici là, les futurs demandeurs doivent évaluer avec soin s’ils souhaitent participer au projet pilote.

« Si on se fonde sur ce cas, il semble que le projet pilote du panel d’inspection de la Banque mondiale n’est guère plus qu’une opération de relations publiques lui permettant de se dérober à ses responsabilités », a déclaré Ashfaq Khalfan.

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