Communiqué de presse

Mexique. Une victime de torture libérée après 20 années passées derrière les barreaux

La décision rendue par la Cour suprême du Mexique, ordonnant la libération immédiate d’un homme incarcéré il y a plus de 20 ans sur la base d’« aveux » extorqués sous la torture, représente une grande victoire pour la justice, a déclaré Amnesty International jeudi 19 mars 2015.

La Cour suprême a ordonné la libération d’Alfonso Martín del Campo Dodd le 18 mars. Il a passé près de 23 ans en prison après avoir été reconnu coupable en 1992 du meurtre de sa sœur et de son beau-frère, un crime qu’il n’a avoué qu’après avoir été détenu de manière arbitraire et torturé à Mexico.

« La libération d’Alfonso Martín del Campo Dodd est une victoire trop longtemps attendue pour la justice. Son dossier aurait dû être classé il y a bien des années, la torture ayant été utilisée pour le contraindre à " avouer ", en violation du droit international relatif aux droits humains », a déclaré Perseo Quiroz, directeur exécutif d’Amnesty International Mexique.

« Ce jugement de la Cour suprême souligne une nouvelle fois qu’il est urgent de combattre le recours généralisé à la torture au sein du système judiciaire mexicain, ce qu’a récemment pointé du doigt le rapporteur spécial de l’ONU sur la torture. »

Alfonso Martín del Campo a été placé en détention arbitraire le 30 mai 1992 à Mexico et des agents du bureau local du procureur général l’ont battu, étouffé et menacé. Des années plus tard, un policier a reconnu qu’il l’avait torturé avec ses collègues. Toutefois, les autorités n’en ont pas tenu compte, pas plus qu’elles n’ont pris en compte les éléments, comme les rapports médicaux, prouvant qu’il avait été torturé.

Selon Amnesty International, cette affaire est emblématique car elle illustre les multiples déficiences de la justice pénale mexicaine, qui perpétue la détention arbitraire et les preuves extorquées sous la torture.

L’organisation a recensé de nombreux cas dans lesquels les juges retiennent à titre de preuve des témoignages obtenus sous la torture. En outre, les allégations de torture ne font pas l’objet d’enquêtes dignes de ce nom. Les rapports des médecins légistes officiels sont souvent incomplets et ceux des experts indépendants passés à la trappe.

Alors qu’Alfonso Martín del Campo avait été examiné par un expert indépendant ayant confirmé qu’il avait été torturé, le système judiciaire local et fédéral a ignoré cet élément pendant plus de 20 ans.

« Les victimes de torture dans notre pays méritent, pour le moins, que les juges prennent en compte les expertises indépendantes qui établissent les faits de torture », a déclaré Perseo Quiroz.

De nombreux organismes internationaux ont recueilli des informations sur le cas d’Alfonso Martín del Campo et confirmé qu’il avait été torturé, notamment la Commission interaméricaine des droits de l’homme et le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire.

Amnesty International exhorte le bureau du procureur général du District fédéral à enquêter sur le meurtre de la sœur et du beau-frère d’Alfonso Martín del Campo, et à traduire les responsables présumés en justice. En outre, Alfonso Martín del Campo a droit à des réparations de la part de l’État pour les violations des droits humains qu’il a subies.

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