Myanmar. Il ne doit pas y avoir de compromis international sur les droits humains

Déclaration publique

Index AI : ASA 16/001/2011

AILRC-FR

11 mars 2011

Au moment où le Rapporteur spécial sur la situation des droits humains au Myanmar présente son rapport devant la 16ème session du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, il serait bon que les gouvernements perlent d’une seule voix et s’élèvent contre la passivité dont le Myanmar fait preuve depuis trop longtemps face aux violations généralisées et systématiques des droits humains dans le pays.

Une nouvelle administration a été nommée après des élections, mais la situation des droits humains au Myanmar ne s’est pas améliorée et aucun signe de changement ne se dessine dans un avenir prévisible. Près de 2 200 prisonniers politiques sont toujours derrière les barreaux ; la plupart sont des prisonniers d’opinion, détenus uniquement pour avoir exercé pacifiquement leur droit à la liberté d’expression, d’association et de réunion. La censure et d’autres importantes restrictions à la liberté d’expression subsistent et les violations du droit international relatif aux droits humains et du droit international humanitaire à l’encontre des minorités ethniques - actions contre des populations civiles notamment, ce qui constitue un crime contre l’humanité – se poursuivent.

En outre, le gouvernement continue de faire preuve de réticence à accepter, et encore plus à appliquer, les recommandations clés faites par la communauté internationale pour améliorer la situation des droits humains. Après l’examen périodique universel (EPU) du Conseil des droits de l’homme qui a examiné le bilan de la situation des droits humains au Myanmar en janvier 2011, le gouvernement n’a pas reconnu la gravité de la situation des droits humains dans le pays et ne s’est engagé à aucune action globale pour remédier aux problèmes évoqués.

Par exemple, le gouvernement a purement et simplement nié détenir des prisonniers politiques et déclaré que les membres de la minorité Rohingya , auxquels il ne reconnaît pas le droit à la citoyenneté du Myanmar, étaient des « immigrants illégaux ». Il a maintenu qu’il n’y avait pas d’impunité dans le pays, en dépit du fait que l’absence de réparations pour des violations graves et systématiques des droits humains au cours de ces dernières décennies a fait l’objet de nombreux rapports.

Le gouvernement a rejeté en tout 70 recommandations faites au cours de la session de l’EPU, lui demandant notamment de libérer les prisonniers politiques, d’abroger les lois accordant l’impunité aux agents de l’État pour des atteintes aux droits humains et sanctionnant les protestations pacifiques, de mettre fin à la discrimination contre les minorités ethniques, d’enquêter sur les actes d’intimidation, de torture et les disparitions forcées et d’en sanctionner les auteurs, d’autoriser le Comité international de la Croix-Rouge à se rendre dans les centres de détention et de réformer l’appareil judiciaire afin de garantir son indépendance et son impartialité.

La réaction négative du Myanmar à ces recommandations jette un éclairage cru sur l’absence de volonté politique du gouvernement de reconnaître ses graves lacunes en matière de droits humains et illustre clairement son peu d’enclin à fournir des réparations effectives aux victimes d’atteintes aux droits humains.

Faisant écho aux principales recommandations du Rapporteur spécial, Amnesty International appelle tous les États siégeant en tant que membres ou en tant qu’observateurs au Conseil des droits de l’homme à exhorter le Myanmar à :
  libérer immédiatement sans condition tous les prisonniers d’opinion ;
  mettre fin à toutes les violations du droit international humanitaire et relatif aux droits humains ;
  abroger toutes les dispositions de la Constitution exemptant les agents de l’État de toutes poursuites pour des violations passées des droits humains et communiquer toutes les informations sur les mesures prises pour enquêter sur les atteintes aux droits humains ;
  permettre des enquêtes indépendantes, impartiales et approfondies sur toutes les allégations d’atteintes graves aux droits humains ; poursuivre les auteurs présumés de tels actes, quel que soit leur grade ou leur statut, les juger dans le cadre d’une procédure équitable ; accorder aux victimes des réparations adéquates conformes aux normes internationales et
  modifier ou abroger toutes les lois ne respectant pas les normes internationales relatives aux droits humains, notamment la Loi de 1982 sur la citoyenneté qui refuse aux Rohingyas le droit à la citoyenneté du Myanmar.

Amnesty International appelle également les États membres et les États observateurs au Conseil des droits de l’homme à :
  se prononcer en faveur du renouvellement du mandat du Rapporteur spécial ;
  mettre en avant la recommandation précédente du Rapporteur spécial en faveur de la création d’une commission d’enquête internationale chargée d’enquêter sur les allégations crédibles de graves crimes internationaux au Myanmar.

Complément d’information
Le 14 mars 2011, le Conseil des droits de l’homme tiendra un débat interactif avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits humains au Myanmar, sur la base de son rapport A/HRC/16/59. Plus tard au cours de la session, le Conseil devra également se prononcer sur un projet de résolution visant, entre autres, à prolonger d’une année le mandat du Rapporteur spécial.

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