Élections - Les droits humains dans la politique étrangère

Amnesty International rappelle l’importance pour la Belgique d’être active dans tous les mécanismes qui visent à renforcer l’égalité de genre, la lutte contre les discriminations et contre les traitements inhumains et dégradants. Il importe de soutenir les défenseur·es des droits humains et de renforcer la lutte contre l’impunité. Ce soutien requiert une volonté politique explicite et un appui financier. L’abolition de la peine de mort doit rester un sujet d’attention constante.

Amnesty International souhaite attirer l’attention sur quelques points en particulier :

La protection des défenseur·es des droits humains partout dans le monde

La Belgique peut par exemple participer activement à la protection de défenseur·es des droits humains menacé·es par les autorités au Burundi [1] . Depuis le 14 février 2023, cinq défenseur·es des droits humains ont été arrêté·es arbitrairement et sont accusé·es de rébellion, d’atteinte à la sûreté intérieure de l’État et au bon fonctionnement des finances publiques. Ces personnes sont membres de deux organisations travaillant sur les violences fondées sur le genre et les droits fonciers, qui sont officiellement agréées au Burundi.

Les autorités diplomatiques doivent prévoir des espaces de rencontres avec les défenseur·es des droits humains ou assister à leurs procès. Il importe que la Belgique puisse rapidement leur accorder des visas en cas de danger.

L’apartheid pratiqué par les autorités israéliennes, un crime contre l’humanité

La Belgique doit dénoncer publiquement ce crime et prendre les mesures qui s’imposent. Le 1er février 2022, Amnesty International a publié un rapport montrant qu’Israël entretient un régime institutionnalisé d’oppression et de domination envers la population palestinienne qualifiable de crime d’apartheid, qui constitue un crime contre l’humanité [2] .

En 2022, deux rapporteurs spéciaux des Nations unies ont également conclu que les autorités israéliennes commettent le crime d’apartheid [3] . Le Rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits humains dans les Territoires palestiniens occupés, Michael Lynk, a présenté son rapport au Conseil des droits de l’homme le 23 mars 2022. Le Rapporteur sur le droit à un logement convenable, Balakrishman Rajagopal, a indiqué lors de la présentation de son rapport le 28 octobre 2022 devant l’Assemblée générale des Nations unies que le régime d’oppression raciale et de discrimination qui a conduit à la destruction de logements palestiniens « n’est rien d’autre que de l’apartheid ».

La Belgique doit dénoncer publiquement le système d’apartheid et demander des comptes aux autorités israéliennes. ll faut mettre fin aux relations économiques avec les entreprises ayant des relations commerciales ou financières avec des colonies illégalement établies dans les territoires occupés.

Les attaques du Hamas et d’autres groupes armés le 7 octobre 2023 contre les populations israéliennes installées à proximité de Gaza ont provoqué un véritable tremblement de terre dans la région et sur la scène internationale.

Au 10 janvier 2024, le bilan des attaques menées par l’armée israélienne à Gaza s’élève, selon le Hamas à plus de 23 000 Palestinien·nes tué·es. En outre, 10 000 personnes sont portées disparues sous les décombres.

Amnesty International condamne les crimes de guerre commis par le Hamas et d’autres groupes armés, notamment les prises d’otages et les homicides délibérés de civils, ainsi que la poursuite de leurs tirs aveugles de roquettes. Amnesty International condamne aussi les crimes de guerre commis par Israël.

L’organisation demande un cessez-le-feu immédiat et durable, la libération des otages civil·es encore aux mains de groupes armés à Gaza, la libération des Palestinien·nes arbitrairement détenu·es par Israël et la fin du siège illégal et inhumain de la bande de Gaza par Israël.
Amnesty International appelle le Conseil de sécurité des Nations unies à adopter une résolution urgente et contraignante en faveur d’un cessez-le-feu immédiat.

En outre, Amnesty International demande que des observateur·trices indépendant·es, notamment le personnel du Haut-Commissariat aux droits de l’homme et les experts des Nations unies, la Cour pénale internationale et les organisations de défense des droits humains se voient accorder l’accès à la bande de Gaza pour y mener des enquêtes sur le terrain.

La situation des droits humains en Égypte

Ces dernières années, la Belgique a renforcé ses liens diplomatiques et économiques avec l’Égypte. Pourtant, les droits humains comme la liberté d’expression et d’association sont fortement restreints dans ce pays. Des milliers de personnes se trouvent toujours en détention arbitraire ou font l’objet de poursuites injustes. Des dizaines sont mortes en prison après qu’on les a délibérément privées de soins de santé et détenues dans des conditions cruelles et inhumaines [4] .

Amnesty International salue la résolution visant à défendre les droits humains en Égypte qui a été adoptée à l’unanimité le 2 mars 2023 par la Chambre des représentants.
Au sein du Conseil des droits de l’homme, la Belgique doit tout mettre en œuvre pour faire adopter des mécanismes capables d’enquêter et d’exiger des comptes au gouvernement égyptien.

La répression cruelle des manifestations en Iran

Les autorités iraniennes pratiquent des emprisonnements arbitraires, des traitements inhumains et dégradants et des exécutions. Le code pénal iranien doit mettre au rebut tous les articles qui portent atteinte à l’intégrité physique des femmes et des filles [5] .

Réclamée par de très nombreuses organisations de défense des droits humains dans le monde et avec l’appui de divers pays, dont la Belgique, une session spéciale du Conseil des droits de l’homme s’est tenue en novembre 2022.

Celle-ci a donné lieu à la création d’une mission d’établissement des faits pour enquêter sur les violations des droits humains liées aux manifestations qui ont commencé le 16 septembre 2022 suite au décès de Mahsa Amini après avoir été arrêtée par la police des mœurs.

La Belgique doit continuer à dénoncer toutes les violations des droits humains commises par ce régime et appeler à l’annulation des condamnations à mort et la fin des prises d’otages [6] .

La libération, le 26 mai 2023, d’Olivier Vandecasteele a suscité la plus grande joie parmi la population belge. Amnesty International a mené une campagne importante en faveur de sa libération. Parallèlement, l’organisation est préoccupée par la libération d’Assadolah Assadi, diplomate iranien condamné en Belgique à 20 ans d’emprisonnement pour son rôle dans une tentative d’attentat à la bombe contre une convention de l’opposition iranienne, qui risque de contribuer à l’impunité et à d’autres prises d’otages par l’Iran. La Belgique et les autres États doivent prendre des mesures urgentes et efficaces pour mettre fin à l’impunité des crimes iraniens, parmi lesquels la prise d’otage.

L’urgence de la crise en Afghanistan

La Belgique doit accueillir et délivrer des visas à celles et ceux qui fuient les persécutions. Tant que le régime sera aussi brutal et discriminatoire, personne ne devrait être renvoyé dans ce pays. À l’ONU, les mécanismes doivent être renforcés pour établir les preuves des exactions et venir en aide à la population, aux femmes et aux enfants en particulier [7]. La communauté internationale doit également prendre les mesures nécessaires pour ouvrir les portes aux missions humanitaires.

La défense du droit à l’avortement

Suite à la décision, en juin 2022, de la Cour suprême des États-Unis d’annuler la protection du droit à l’avortement, des millions de personnes à travers les États-Unis ont subi une détérioration alarmante de l’accès aux soins de santé sexuelle et reproductive. En janvier 2023, l’avortement est interdit dans 14 États du pays. La Belgique doit exercer sa capacité d’influence sur les États-Unis pour promouvoir les droits humains et les droits sexuels et reproductifs en particulier, dans les forums internationaux et ses relations bilatérales.

Le renforcement de l’État de droit dans l’Union européenne

La situation des droits humains dans l’Union européenne présente de nombreuses sources de préoccupation, notamment en ce qui concerne le droit à l’avortement, les droits des personnes LGBTI+, la liberté d’expression et l’indépendance de la justice. Le 13 février 2023, la Belgique a annoncé son soutien à la démarche de la Commission européenne devant la Cour de justice de l’Union européenne contre la loi hongroise homophobe du 15 juin 2021. Amnesty International a salué cette initiative.

La Belgique doit continuer à faire valoir les dispositions de l’article 7 du Traité de l’Union européenne. Celui-ci donne
la possibilité à l’Union européenne de sanctionner un État qui ne respecterait pas ses valeurs fondatrices. La Pologne et la Hongrie sont les deux États directement ciblés par l’usage de l’article 7.

Le renforcement de la lutte contre l’impunité

Depuis le 24 février 2022, la guerre fait rage sur le sol ukrainien. Amnesty International a dénoncé un acte d’agression contraire au droit international.

Le 17 mars 2023, la Chambre préliminaire de la Cour pénale internationale (CPI) a émis un mandat d’arrêt contre le président russe pour la déportation d’enfants de zones occupées d’Ukraine vers la Fédération de Russie. Les États peuvent également collaborer à établir la justice en s’appuyant sur la compétence universelle pour poursuivre les auteurs de crimes de guerre commis en Ukraine.

Le soutien à la CPI doit aussi se matérialiser par l’apport de moyens financiers. Amnesty International demande à la CPI de veiller à ce que tous les fonds soient alloués sans discrimination et conformément aux intérêts de la justice et de faire en sorte que toutes les victimes de crimes internationaux bénéficient d’un accès égal aux droits à des réparations [8].

Le 26 mai 2023, des délégations de plus de 70 États, réunis en Slovénie, ont trouvé un accord sur un traité d’entraide judiciaire dans tous les cas de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité [9]. Ce traité définit les obligations des États en matière de coopération judiciaire et d’extradition dans le cadre des enquêtes sur les crimes relevant du droit international. Il s’agit d’une avancée historique pour la quête de justice des victimes au regard du droit international. La Belgique a été un acteur de premier plan sur ce dossier et Amnesty International a salué les efforts qui ont permis l’adoption du texte. L’organisation espère que la Belgique sera active pour que la nouvelle Convention de Ljubljana-La Haye, parfois désignée comme le Traité d’entraide judiciaire, puisse rapidement montrer ses effets en faveur de la justice internationale. Ce traité sera ouvert à la signature dès le 14-15 février 2024.

Abolition de la peine de mort

L’abolition de la peine de mort doit rester une préoccupation constante de la politique extérieure belge. Le dernier rapport d’Amnesty International montre une remontée en flèche des exécutions judiciaires enregistrées dans le monde en 2022. Au total, l’organisation a dénombré 883 personnes exécutées dans 20 pays, ce qui correspond à une hausse de 53 % par rapport à l’année 2021.

Les recommandations d’Amnesty International à propos des droits humains dans la politique étrangère :

  • Prioriser la protection des défenseur·es des droits humains dans les affaires étrangères, y compris dans les activités des missions diplomatiques de la Belgique.
    Fiche thématique pour les élections fédérales et régionales 2024
  • Accorder rapidement des visas en cas de danger ou pour permettre la participation de défenseur·es à des forums sur les droits humains.
  • Dénoncer publiquement l’apartheid pratiqué par les autorités israéliennes et adopter des mécanismes capables d’enquêter et d’exiger des comptes aux responsables de ce crime.
  • Tout mettre en œuvre pour qu’un cessez-le-feu soit adopté au plus vite et de façon durable à Gaza pour permettre à la population d’avoir accès aux biens de première nécessité et de pouvoir être secourues par un personnel soignant en mesure de répondre à leur demande.
  • Soutenir la procédure engagée par la Cour internationale de justice à l’initiative de l’Afrique du Sud, dont les mesures conservatoires permettraient un cessez-le-feu immédiat et l’entrée de l’aide humanitaire à Gaza.
  • Soutenir les mécanismes des Nations unies et de la Cour pénale internationale qui doivent pouvoir enquêter sur les crimes commis par toutes les parties du conflit israélo-palestinien.
  • Interdire sur son territoire le transit d’armes à destination d’Israël et des groupes armés palestiniens.
  • Soutenir et veiller à la mise en œuvre des résolutions adoptées au Conseil des droits de l’homme des Nations unies qui ont pour but de renforcer les droits humains et l’adoption de mécanismes capables d’enquêter et d’exiger des comptes aux gouvernements qui violent les droits fondamentaux.
  • Soutenir publiquement et activement les droits sexuels et reproductifs. Défendre l’État de droit dans l’Union européenne en dénonçant les politiques restrictives qui touchent les droits humains, en particulier les inégalités de genre, les droits des personnes LGBTQI+ et le respect du principe de l’indépendance de la justice.
  • Soutenir activement la lutte contre l’impunité en ratifiant et en développant une campagne en vue d’obtenir une large ratification la Convention de Ljubljana-La Haye, aussi désignée comme le Traité d’entraide judiciaire.
  • Appeler sans discontinuer à l’abolition de la peine de mort, sujet qui doit rester prioritaire dans les échanges diplomatiques.

Fiche revue à la date du 10 janvier 2024

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