Israël/Territoires occupés/Liban : escalade de la violence

Crimes de guerre au Liban
Appel à enquête internationale
Catastrophe humanitaire à Gaza
Appel au Conseil de sécurité
Proposition d’action

De jour en jour, la situation se dégrade pour la population civile en Israël, dans la Bande de Gaza et au Liban. Les attaques actuellement perpétrées contre des civils et des biens civils constituent une violation flagrante du droit international humanitaire et équivalent à des crimes de guerre. Il est essentiel, en cette période où la tension ne cesse d’augmenter à un rythme inquiétant, que toutes les parties se conforment aux exigences du droit international humanitaire et que d’autres gouvernements prennent toutes les mesures appropriées pour les obliger à le faire.

Israël doit mettre immédiatement un terme aux attaques dirigées contre des civils et des infrastructures civiles au Liban et respecter le principe de proportionnalité.
Le Hezbollah doit cesser de lancer des attaques contre des civils israéliens et doit traiter humainement les deux soldats israéliens enlevés le 12 juillet et leur permettre de prendre contact immédiatement avec le CICR.
Le gouvernement libanais doit prendre des mesures concrètes visant à sassurer que le Hezbollah se conforme aux obligations du droit international.

Crimes de guerre au Liban


Les forces israéliennes ont lancé une série d’attaques délibérées contre des biens de caractère civil dans tout le Liban. L’aéroport international de Beyrouth, dix ponts et une centrale électrique ont été touchés ; était également visé le Hezbollah, dont les bureaux de la chaîne de télévision Al Manar à Beyrouth et un émetteur à Baalbek ont été touchés.
Parmi les victimes libanaises, on compte une famille de dix personnes, dont huit enfants, tués dans le village de Dweir, près de Nabatiyeh et une famille de sept personnes, dont un bébé de sept mois, tués dans le village de Baflay, près de Tyr. Dans le même temps, le Hezbollah a lancé des roquettes Katioucha dans le nord d’Israël. Une Israélienne a été tuée et des dizaines de civils blessés lorsqu’une roquette Katioucha est tombée sur une maison dans la ville de Nahariya ce jeudi 13 juillet.

La Quatrième Convention de Genève interdit les « peines collectives, de même que toute mesure d’intimidation ou de terrorisme » (article 33). L’article147 de la Convention établit que « la destruction et l’appropriation de biens non justifiés par des nécessités militaires et exécutées sur une grande échelle de façon illicite et arbitraire » constituent une violation grave des Conventions de Genève et sont des crimes de guerre. Tous les Etats parties à la Convention sont tenus de poursuivre les auteurs présumés de violations graves de ladite Convention.

Le Protocole I additionnel aux Conventions de Genève codifie le principe de distinction, règle fondamentale du droit international humanitaire coutumier : « En vue d’assurer le respect et la protection de la population civile et des biens de caractère civil, les Parties au conflit doivent en tout temps faire la distinction entre la population civile et les combattants ainsi qu’entre les biens de caractère civil et les objectifs militaires et, par conséquent, ne diriger leurs opérations que contre des objectifs militaires. » (article 48). Le droit international humanitaire interdit strictement toute attaque contre des des civils ou des biens de caractère civil. Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) définit comme crime de guerre : « Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre la population civile en tant que telle ou contre des civils qui ne participent pas directement aux hostilités » et « Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des biens de caractère civil » (article 8 2 (b) (i) et (ii).

Appel à une enquête internationale


Amnesty International appelle les Nations Unies pour qu’elles constituent et déploient en Israël et dans les territoires occupés une équipe d’expert·e·s reconnu·e·s chargé·e·s de mener une enquête indépendante et exhaustive sur la détérioration de la situation des droits humains dans la bande de Gaza.
Cette équipe devrait enquêter sur le nombre toujours plus grand de Palestinie·ne·ns tué·e·s par les forces israéliennes et sur les attaques délibérées et disproportionnées des forces israéliennes contre des biens et des infrastructures civils dans la bande de Gaza, ainsi que sur le lancement de roquettes artisanales qassam par des groupes armés palestiniens dans les parties d’Israël voisines de la bande de Gaza.

L’équipe chargée de cette enquête devrait disposer de moyens suffisants. Elle devrait être composée d’enquêteurs impartiaux, possédant l’expertise nécessaire dans la conduite d’enquêtes criminelles et médico-légales. Elle devrait compter parmi ses membres des spécialistes dans les domaines de la médecine médico-légale, de la balistique et du droit humanitaire et relatif aux droits humains. Toutes les parties – Israéliens et Palestiniens – devraient accepter de coopérer pleinement avec les experts et leur permettre d’accéder sans restriction aux personnes, aux lieux et aux documents.

Amnesty International estime que la gravité de la situation nécessite une approche globale permettant d’enquêter sur tous les aspects de la crise actuelle, y compris sur les facteurs qui la favorisent. L’objectif devrait être de définir les responsabilités respectives de chacune des parties concernées et d’identifier les mesures concrètes que chacune devrait prendre pour assurer la protection de la population et offrir des voies de recours efficaces et accessibles aux victimes de ses actes.

Après une année marquée par une diminution sensible du nombre d’homicides commis par les deux parties, la situation s’est fortement détériorée ces derniers mois. Depuis le début de l’année 2006, les forces israéliennes ont tué quelque 150 Palestinien·ne·s – dont beaucoup n’étaient pas armé·e·s – parmi lesquels plus de 25 enfants. À ce jour, aucune de ces affaires n’a fait l’objet d’une enquête satisfaisante.

Ces derniers mois, l’armée israélienne a procédé à plusieurs milliers de tirs d’artillerie et a mené des dizaines de raids aériens sur des zones densément peuplées de la bande de Gaza. Ces attaques ont fait des dizaines de morts parmi les Palestiniens, dont plusieurs femmes et enfants.

Dans le même temps, des groupes armés palestiniens ont lancé sans discrimination des centaines de roquettes artisanales qassam en direction d’Israël, blessant plusieurs civil·e·s.

Plus récemment, à la suite de l’enlèvement d’un soldat israélien par des groupes armés palestiniens, qui le détenaient toujours en otage le 18 juillet, les forces israéliennes ont bombardé à plusieurs reprises, de manière délibérée, des systèmes de fourniture d’eau et d’électricité, des routes et d’autres infrastructures civiles, des établissements scolaires et d’autres institutions publiques, ainsi que des biens privés, dans la bande de Gaza. Ces destructions ont de graves conséquences humanitaires sur la population palestinienne, dont la situation s’était déjà détériorée à cause des sanctions imposées depuis la victoire du Hamas (Mouvement de la résistance islamique) aux élections palestiniennes de janvier 2006.

Les deux camps affirment que leurs attaques respectives sont menées en réponse aux attaques de l’autre camp, faisant fi des règles du droit international qui interdisent les représailles, les attaques délibérées contre des civils et les attaques disproportionnées et sans discrimination mettant en danger la vie de personnes civiles.

Alors que la tension continue de monter entre Israël d’une part et l’Autorité palestinienne et les groupes armés palestiniens d’autre part, l’inquiétude grandit pour la sécurité de la population civile. Amnesty International exhorte le Conseil des droits de l’homme à aborder la situation de manière exhaustive et constructive. Elle l’invite à formuler des propositions concrètes garantissant la protection efficace des droits humains de tous ceux qui sont pris dans la crise actuelle – populations palestinienne et israélienne. En vertu de la résolution 60/251 de l’Assemblée générale des Nations unies, le Conseil des droits de l’homme a clairement et sans ambiguïté pour mandat de s’occuper de situations spécifiques relatives aux droits humains, notamment des violations flagrantes et systématiques de ces droits, ainsi que de réagir dans les plus brefs délais aux urgences dans ce domaine. La situation qu’il examine aujourd’hui répond clairement à ces critères.

Amnesty International appelle tous les membres du Conseil des droits de l’homme à relever le défi en prenant des mesures concrètes qui changent réellement les choses pour les personnes touchées par la crise actuelle. Le Conseil doit éviter de reproduire la situation qui a prévalu pendant des années au sein de la Commission des droits de l’homme, qui a beaucoup parlé de la situation dans les territoires occupés palestiniens mais a très peu agi. Amnesty International estime que le déploiement d’experts internationaux chargés d’enquêter sur la détérioration de la situation des droits humains dans la bande de Gaza serait une mesure concrète importante.

Catastrophe humanitaire à Gaza


L’organisation a condamné les attaques telles que celle menée par les forces israéliennes dans la nuit du 11 au 12 juillet 2006 ; une famille entière – Nabil et Salwa Abou Salmiya et leurs sept enfants âgés de sept à dix-sept ans - ont été tués lorsque leur maison, située dans un quartier résidentiel très peuplé de Jabaliya, au nord de la ville de Gaza, a été prise pour cible par l’aviation israélienne. Plus d’une trentaine d’autres résident·e·s ont été blessé·e·s lors de l’attaque.

Des responsables du gouvernement israélien ont affirmé que le raid aérien visait Muhammad Deif, un dirigeant de la branche armée du Hamas, dont la présence aurait été signalée dans le bâtiment au moment de l’attaque et qui aurait été blessé. Toutefois, le gouvernement et les responsables militaires qui ont ordonné et mené le raid aérien sur le bâtiment aux alentours de 2h30 du matin devaient savoir que Nabil Abou Salmiya, enseignant à l’université et membre du Hamas, sa femme et ses enfants seraient chez eux et qu’ils seraient tués ou blessés en même temps qu’un certain nombre d’autres résident·e·s.

De telles attaques contre des civil·e·s sont interdites en droit international et Amnesty International lance un appel pour qu’y soit mis un terme immédiatement. Au cours de ces dernières semaines, des dizaines de femmes, d’enfants et de passants palestiniens ont été tués et des centaines d’autres blessés par les forces israéliennes dans des raids aériens et des pilonnages d’artillerie – parfois même dans leurs maisons.

Outre les neuf membres de la famille Abou Salmiya, une quinzaine d’autres Palestinien·ne·s ont été tué·e·s au cours de ces deux derniers jours, ce qui porte en date du 14 juillet à 240 le nombre de Palestinien·ne·s tué·e·s par les forces israéliennes cette année. Ce chiffre englobe de nombreux membres de groupes armés palestiniens tué·e·s lors d’affrontements armés avec les soldats israéliens mais aussi de nombreux passants non impliqués dans les combats, parmi lesquels des dizaines d’enfants. Dans le même temps, une vingtaine d’Israéliens, des civils pour la plupart, ont été tués par des groupes armés palestiniens.

Alors que s’accroît la tension après l’enlèvement d’un soldat israélien par des Palestiniens armés il y a deux semaines, une crise humanitaire grave se profile dans la bande de Gaza, avec des conséquences de plus en plus sérieuses pour les quelque un million et demi de Palestiniens qui y vivent.

La poursuite de la fermeture du point de passage de Rafah entre la bande de Gaza et l’Égypte empêche tout déplacement pour l’ensemble de la population de Gaza. Des centaines de Palestiniens qui se trouvaient à l’étranger lorsque la frontière a été fermée sont bloqués depuis des jours côté égyptien de la frontière, sans pouvoir rentrer chez eux à Gaza.

La pénurie de médicaments, de nourriture et de carburant s’aggrave du fait des fermetures répétées et prolongées, par Israël, du point de contrôle de Karni par lequel transitent tous les biens entrant dans la bande de Gaza. Depuis la destruction de la centrale électrique et de canalisations d’eau à Gaza par les troupes israéliennes il y a deux semaines, la plupart des habitants palestiniens se retrouvent sans électricité ni eau la plupart du temps et la situation s’aggrave en raison de la pénurie de carburant nécessaire au fonctionnement des générateurs et pompes à eau.

Les conséquences sont particulièrement graves dans les secteurs de la santé et de l’assainissement – particulièrement à cette période de l’année où la fourniture en électricité et en eau est essentielle au fonctionnement des appareils de réfrigération et de conservation des aliments et des médicaments.

Amnesty International a déclaré qu’Israël devait lever rapidement les mesures de fermeture et les restrictions arbitraires imposées aux points de passage de Rafah et Karni et permettre l’entrée et la sortie de la bande de Gaza des personnes et des marchandises. Selon l’organisation, Israël doit également réparer la centrale électrique, les conduites d’eau, les ponts et autres infrastructures détruites par ses troupes.

Les groupes palestiniens armés pour leur part doivent cesser de lancer des roquettes Qassam et autres projectiles sur Israël.

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