PHILIPPINES. Une campagne électorale marquée par des meurtres à caractère politique

Communiqué de presse

ÉFAI- 6 mai 2010

Les candidats à l’élection présidentielle aux Philippines se doivent de faire connaître leur programme de lutte contre la violence politique, qui a abouti au meurtre d’au moins cinq candidats à différentes élections et de 16 organisateurs de campagne depuis le début de l’année, a déclaré Amnesty International ce jeudi 6 mai 2010.

Alors que cette violence continue de ternir la période pré-électorale – le scrutin est fixé au 10 mai –, Amnesty International lance un appel aux candidats afin qu’ils s’engagent à démanteler les milices privées responsables des attaques liées à l’élection.

La violence politique avait déjà atteint des niveaux records avant même le début officiel de la campagne électorale, en février. Le 23 novembre 2009, 63 personnes qui se déplaçaient avec un candidat de l’opposition ont été tuées dans la province de Maguindanao.

Andal Ampatuan Sr, le gouverneur de la province à cette époque, ainsi que des membres de son armée privée, ont par la suite été arrêtés et accusés de ces meurtres.

«  L’affaire de Maguindanao aurait dû inciter la présidente à abolir ces milices, a déclaré Lance Lattig, chercheur d’Amnesty International sur les Philippines. Quiconque remporte cette élection devra désarmer et démanteler ces armées privées une fois pour toutes. »

Le nombre de ces milices privées est passé de 68 en décembre à 117 en février, d’après Dante Jimenez, membre de la commission présidentielle chargée de leur démantèlement.

Malgré la vive indignation soulevée par le massacre de Maguindanao, la présidente Gloria Arroyo n’a pas abrogé l’ordonnance 546 de 2006 qui autorisait de fait les armées privées.

« La bataille pour cette élection est autant une affaire de balles de fusil que de bulletins de vote, a ajouté Lance Lattig. Le nouveau président devra résoudre le problème des milices privées et des meurtres politiques qui entachent l’héritage laissé par Gloria Arroyo. »

Au-delà du massacre de Maguindanao, les meurtres politiques aux Philippines constituent toujours un problème endémique, attisé par une culture de l’impunité. Malgré plusieurs dizaines de nouveaux cas par an, peu d’enquêtes dignes de ce nom ont été menées, et les poursuites devant les tribunaux sont rares.

Lors de cette campagne, de par leur nombre, les homicides à caractère politique sont apparus comme un moyen pour éliminer les rivaux. D’autres actes de violence, notamment des attaques à la grenade, ont servi à intimider des sympathisants politiques.

Amnesty International a eu connaissance de neuf cas où des candidats ou des directeurs de campagne qui ont été victimes de meurtres politiques :

Kagi Ketong, directeur de campagne de Montasir et Abdulwahab Saban, candidats à des postes de maire et de vice-maire, a été tué dans une attaque à la grenade lancée contre un rassemblement politique à Datu Odin Sinsuat (Maguindanao), le 15 avril.
Edwin Segue, conseiller municipal du village de San Antonio et reporter de radio, a été abattu par des tireurs circulant à moto dans la ville d’Ozamis, (Misamis occidental), le 14 avril.
McArthur « Tol » Cortez, candidat au conseil municipal de Sarangani (province de Davao sud), a été tué à Digos le 12 avril.
Bernardo Olarte, directeur de campagne du candidat à la fonction de maire Junjun Binay, a été abattu devant sa maison dans la ville de Makati (agglomération de Manille), le 31 mars.
Willy Viloria, candidat à la fonction de vice-gouverneur de Zambales, a été abattu par des tireurs non identifiés à son domicile, à Cabangan (Zambales), le 7 mars.
Ponciano Numeron, candidat au conseil municipal de Pasacao et ancien policier, aurait été abattu par les forces de la Nouvelle armée du peuple (NPA) dans la province de Camarines sud, le 5 mars.
Luis Mondia Jr. candidat au poste de maire et ancien maire de Pulupandan (Negros occidental), a été tué à Jaro (province d’Iloilo) le 17 février.
Oscar Animo, organisateur local de la campagne présidentielle de Gilberto Teodoro, a été tué alors qu’il circulait à moto à Tagana-an (Surigao nord) le 2 février.
Julio « Bimbo » Esquivias, candidat au conseil municipal de Casiguran (Sorsogon), a été tué le 5 janvier.

Dans huit de ces neuf cas, aucun suspect n’a été arrêté à ce jour, d’après les informations parues dans les médias.

Dans le cas de Oscar Animo, la police de Tagana-an a annoncé, en mars, qu’elle avait arrêté trois suspects le 2 mars.

À la date du 5 avril, près de deux mois après le meurtre de Luis Mondia, la police de Pulupandan attendait toujours que des mandats d’arrêts soient décernés.

La réaction des autorités a été plus ferme dans le cas de Ponciano Numeron, le candidat qui aurait été tué par des membres de la NPA. Le site web de la 9e division d’infanterie signalait en effet, le 24 avril, que le général de division Ruperto Pabustan dirigeait le 42e bataillon d’infanterie chargé de pourchasser les suspects. Aucun suspect n’a toutefois été arrêté à ce jour.

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