Nicaragua. La loi sur l’avortement met en péril la vie d’une femme enceinte atteinte d’un cancer

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

ÉFAI - 23 février 2010

Amnesty International a appelé ce mardi 23 février 2010 les autorités nicaraguayennes à autoriser une femme enceinte à recevoir un traitement contre le cancer actuellement suspendu en raison d’une loi qui interdit l’avortement en toutes circonstances.

Amalia (son nom a été modifié), âgée de 27 ans, est enceinte de 10 semaines. Le 2 février 2010, on a diagnostiqué chez elle un cancer qui a peut-être déjà atteint le cerveau, les poumons et les seins.

Les autorités du Nicaragua dissuadent les médecins de lui administrer un traitement contre le cancer pendant sa grossesse, car le personnel médical s’exposerait à des poursuites pénales s’il causait du tort au fœtus, même involontairement, lors du traitement.

« Il est choquant que le Nicaragua prive une patiente atteinte d’un cancer de soins qui pourraient lui sauver la vie au motif qu’elle est enceinte, a déclaré Esther Major, responsable des recherches sur l’Amérique centrale à Amnesty International.

« La situation d’Amalia illustre clairement les répercussions de cette loi draconienne et montre à quel point il est urgent de l’abroger, car elle empêche de prodiguer des soins en temps voulu et fait obstacle à un jugement médical éthique, a ajouté Esther Major. Chaque jour compte pour les chances de survie d’Amalia et les autorités nicaraguayennes doivent prendre immédiatement des mesures afin qu’elle reçoive tous les soins nécessaires au traitement de son cancer. »

Les médecins qui soignent Amalia ont refusé de recourir à la radiothérapie et à la chimiothérapie, par crainte d’être poursuivis.

En outre, Amalia élève seule sa fillette de 10 ans. En décembre 2009, Amalia est allée se faire soigner dans une clinique locale parce qu’elle souffrait de troubles respiratoires, de fièvre, de nausées et d’évanouissements. Envoyée vers un hôpital pour faire des examens, elle y est hospitalisée depuis le 2 février. Ses médecins ont déclaré qu’elle avait besoin de toute urgence de séances de chimiothérapie et de radiothérapie, mais n’ont pas démarré ces traitements par peur de causer involontairement du tort au fœtus.

« L’interdiction de l’avortement thérapeutique au Nicaragua est un scandale en matière de droits humains, qui tourne en ridicule la médecine et fait de la loi une arme empêchant d’offrir des soins essentiels aux femmes et aux jeunes filles enceintes », a affirmé Esther Major.

En 2006, avant que l’interdiction totale de l’avortement ne soit adoptée, 21 associations médicales nicaraguayennes représentant l’ensemble des disciplines de la médecine ont publié une déclaration commune afin de protester contre ce projet de loi. Elles soulignaient que, s’il était adopté, il limiterait la capacité des professionnels de la santé à administrer des soins et à exercer leur profession.

Le 18 février, plusieurs organisations non gouvernementales (ONG) nicaraguayennes et la plus importante société de gynécologues du Nicaragua se sont tournées vers la Commission interaméricaine des droits de l’homme pour qu’elle adopte des « mesures spéciales » qui exigeraient du gouvernement qu’il s’acquitte des obligations juridiques lui imposant de protéger le droit à la vie et à la santé d’Amalia et qu’il fasse en sorte qu’elle reçoive sans délai les soins susceptibles de sauver, ou tout au moins de prolonger, sa vie.

« L’interdiction totale de l’avortement au Nicaragua est illégale et le gouvernement nicaraguayen a ignoré les appels en faveur de l’abrogation de la loi pénalisant l’avortement émanant de quatre comités d’experts des Nations unies chargés du suivi de l’application des traités, dont le Comité contre la torture », a expliqué Esther Major.

Il y a deux semaines, 11 États membres des Nations unies ont demandé au Nicaragua de modifier sa loi sur l’avortement, en raison de l’augmentation du taux de mortalité maternelle et du nombre de victimes de viol contraintes de mener leur grossesse à terme depuis l’adoption de ce texte.

« Par ailleurs, un recours en inconstitutionnalité contre cette loi est en instance devant la chambre constitutionnelle de la Cour suprême du Nicaragua depuis plus d’un an, a ajouté Esther Major.

« Amnesty International est consternée par le refus du gouvernement nicaraguayen de répondre aux appels en faveur de la modification de cette loi cruelle. »

Vous pouvez consulter le rapport d’Amnesty International sur les conséquences de l’interdiction totale de l’avortement au Nicaragua : voir ici.

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