Libye

Chef de l’État : Mouammar Kadhafi

Chef du gouvernement : al Baghdadi Ali al Mahmudi

Peine de mort : maintenue

Population : 6,3 millions

Espérance de vie : 73,4 ans

Mortalité des moins de cinq ans (M/F) : 20 / 19 ‰

Taux d’alphabétisation des adultes : 84,2 %

La situation des droits humains et les violations persistantes de ces droits assombrissaient l’amélioration du statut international de la Libye. La liberté d’expression, d’association et de réunion était toujours fortement restreinte, dans un climat caractérisé par la répression de la dissidence et l’absence d’ONG indépendantes de défense des droits humains. Cette année encore, des réfugiés, des demandeurs d’asile et des migrants ont été maintenus en détention illimitée et maltraités. Au moins huit étrangers ont été exécutés. Le gouvernement n’a rien fait pour remédier aux violations des droits humains commises dans le passé.

Contexte

Les relations diplomatiques de la Libye avec les États-Unis et les pays européens ont continué de s’améliorer.

En septembre, la secrétaire d’État américaine, Condoleezza Rice, s’est rendue à Tripoli après que les deux pays eurent conclu, le mois précédent, un accord de règlement concernant, entre autres, l’attentat de Lockerbie contre un avion.

En août, le gouvernement a conclu avec l’Italie un traité d’amitié, de partenariat et de coopération dont une disposition prévoyait des initiatives bilatérales pour lutter contre l’« immigration clandestine ». Des négociations ont débuté en novembre avec l’Union européenne autour d’un accord cadre portant notamment sur la coopération économique et la politique migratoire.

Au cours du même mois, le gouvernement a mené des négociations au plus haut niveau avec la Russie au sujet d’une coopération énergétique, du développement du nucléaire civil et de la politique étrangère.
"Des informations persistantes ont fait état de torture et d’autres mauvais traitements infligés à des réfugiés, des demandeurs d’asile et des migrants durant leur détention."

Les autorités n’ont pas répondu aux demandes du rapporteur spécial des Nations unies sur la torture et du Groupe de travail sur la détention arbitraire, qui souhaitaient se rendre dans le pays.

Répression de la dissidence

Le gouvernement, qui ne tolérait pas la critique ni la dissidence, conservait des lois draconiennes à des fins dissuasives. C’est ainsi qu’aux termes du Code pénal et de la Loi n° 71 de 1972 relative à la criminalisation des partis, toute expression politique indépendante et toute forme d’activité collective sont interdites. Les personnes qui exercent, même pacifiquement, leur droit à la liberté d’expression et d’association sont passibles de la peine de mort. Comme les années précédentes, les autorités prenaient des mesures contre quiconque abordait ouvertement des questions sensibles comme la situation des droits humains dans le pays ou l’exercice du pouvoir par Mouammar Kadhafi.

Fathi el Jahmi était maintenu en détention au Centre médical de Tripoli. Ce prisonnier d’opinion avait été arrêté en mars 2004 après avoir appelé à des réformes politiques et critiqué le chef de l’État dans des interviews à des médias étrangers. Il avait été déclaré mentalement inapte lors de sa comparution en justice en septembre 2006. Après l’avoir examiné, en mars, un médecin indépendant mandaté par Physicians for Human Rights (Médecins pour les droits humains), une ONG basée aux États-Unis, a conclu qu’il ne présentait pas de troubles psychiques, mais qu’il était en mauvaise santé et devait subir une intervention chirurgicale.

Idriss Boufayed et 11 autres personnes ont comparu devant la Cour de sûreté de l’État. Créée en août 2007 pour juger les personnes accusées d’activités politiques non autorisées et d’atteintes à la sûreté de l’État, cette juridiction appliquait une procédure ne respectant pas les normes internationales d’équité. Cet homme et 10 de ses coaccusés ont été condamnés à des peines allant jusqu’à vingt-cinq ans d’emprisonnement. Ils avaient été reconnus coupables d’accusations formulées en termes vagues, notamment de « tentative de renversement du système politique », de « diffusion de fausses rumeurs sur le régime libyen » et de « communication avec des puissances ennemies ». Le douzième accusé a été acquitté. Les détenus n’ont pas pu consulter les avocats commis d’office en dehors de la salle d’audience ; à une exception près, ils n’ont par ailleurs pas eu le droit de choisir leur défenseur.

Idriss Boufayed et ses coaccusés avaient été arrêtés en février 2007, après que lui-même et trois autres hommes avaient publié un communiqué annonçant leur intention d’organiser une manifestation pacifique pour rappeler la mort d’au moins 12 personnes, tuées lors d’une manifestation à Benghazi en février 2006. Deux hommes arrêtés en même temps qu’eux n’ont pas été jugés. Jumaa Boufayed a été libéré le 27 mai, après avoir été maintenu au secret pendant plus d’un an dans la prison d’Aïn Zara. On ignorait tout du sort d’Abdelrahman al Qateewy. Idriss Boufayed a été remis en liberté en octobre, et huit de ses coaccusés ont été élargis en novembre, sans qu’aucune explication ne soit fournie. Deux hommes condamnés dans le cadre de cette affaire étaient maintenus en détention à la fin de l’année.

Liberté d’association

Le droit à la liberté d’association était fortement restreint et le gouvernement n’autorisait pas les ONG indépendantes de défense des droits humains à agir dans le pays. La seule organisation autorisée à aborder la question des droits fondamentaux était l’Association des droits humains de la Fondation internationale Kadhafi pour le développement, dirigée par Saif al Islam Kadhafi, un des fils du chef de l’État. En juillet, cette fondation a lancé l’« appel Kadhafi », une initiative qui encourageait la population à soumettre des informations et des plaintes à propos de violations des droits humains.

En mars, un groupe d’avocats, de journalistes et d’écrivains a sollicité l’enregistrement d’une nouvelle ONG, le Centre pour la démocratie, qui avait pour objet la « diffusion des valeurs démocratiques, des droits humains et de l’état de droit en Libye ». La demande a ensuite été retirée. Selon le président du comité fondateur, cette décision a été prise parce que les autorités avaient émis des objections à propos de 12 membres fondateurs de l’organisation et aussi en raison d’une attaque contre Dhow al Mansouri, qui présidait le comité fondateur de l’Association juridique des droits humains au sein du Centre pour la démocratie. Cet homme a été enlevé et battu en juin par trois inconnus qui l’ont mis en garde contre la création de l’ONG.

Lutte contre le terrorisme et sécurité

En avril, la Fondation internationale Kadhafi pour le développement a annoncé que 90 membres du Groupe islamique combattant libyen avaient été remis en liberté à la suite de négociations avec les dirigeants de cette organisation. La Fondation a précisé que ces 90 détenus représentaient le tiers des membres du groupe.

Les autorités n’ont fourni aucune information à propos d’Abdesalam Safrani et d’Abu Sufian Ibrahim Ahmed Hamuda, deux Libyens détenus par les États-Unis à Guantánamo Bay et qui avaient été incarcérés à leur retour en Libye, respectivement en décembre 2006 et septembre 2007. L’absence d’information suscitait des préoccupations quant à leur sécurité et à celle d’autres Libyens susceptibles d’être pareillement renvoyés dans leur pays. À la fin de l’année, sept autres Libyens au moins étaient toujours détenus par les États-Unis à Guantánamo Bay.

Impunité

Les autorités n’ont pris aucune initiative pour mettre un terme à l’impunité dont bénéficiaient depuis longtemps les responsables d’atteintes graves aux droits humains. Aucune information n’a été fournie sur l’enquête menée sur les événements qui se sont déroulés en 1996 dans la prison d’Abou Salim, à Tripoli, au cours desquels plusieurs centaines de prisonniers auraient trouvé la mort. La Fondation Kadhafi pour le développement a annoncé qu’un rapport préliminaire établissant les responsabilités civile et pénale dans cette affaire allait être remis aux autorités judiciaires, sans toutefois indiquer une date. On a appris en juin que le tribunal de Benghazi-Nord avait ordonné aux autorités de révéler le sort d’une trentaine de prisonniers dont on craignait qu’ils ne soient morts en détention durant les événements de la prison d’Abou Salim. Aucune information n’a été rendue publique. Certaines sources ont laissé entendre que les autorités avaient accepté d’indemniser les familles d’environ 35 prisonniers décédés, à condition qu’elles renoncent à exercer des voies de recours judiciaires.

Aucune initiative n’a été prise dans le domaine des violations flagrantes des droits humains commises dans le passé. Parmi ces atteintes, perpétrées en particulier dans les années 1970, 1980 et 1990, figuraient la disparition forcée de plusieurs centaines d’opposants et de détracteurs du gouvernement. Beaucoup sont probablement morts ou ont été tués en détention.
Les autorités n’ont pas mené d’enquête sérieuse sur un cas de mort en détention dans des circonstances peu claires.

Mohammed Adel Abu Ali, renvoyé de Suède en mai, serait mort en détention au cours du même mois. Il avait été arrêté à son arrivée en Libye. Les autorités ont affirmé qu’il s’était suicidé, mais une enquête diligentée par le ministère suédois des Affaires étrangères a conclu qu’il était impossible d’établir les circonstances de la mort de cet homme.

Réfugiés, demandeurs d’asile et migrants

Des informations persistantes ont fait état de torture et d’autres mauvais traitements infligés à des réfugiés, des demandeurs d’asile et des migrants durant leur détention. Les demandeurs d’asile ne bénéficiaient d’aucune protection, contrairement aux dispositions du droit international relatif aux réfugiés. Le 15 janvier, le gouvernement a annoncé son intention d’expulser tous les « migrants clandestins » ; il a ensuite procédé à des expulsions collectives de Ghanéens, de Maliens, de Nigérians et de ressortissants d’autres pays. Au moins 700 hommes, femmes et enfants érythréens ont été placés en détention. Ils risquaient d’être renvoyés contre leur gré en Érythrée, où l’on craignait qu’ils ne soient victimes d’atteintes graves à leurs droits fondamentaux.

Le 21 juin, les autorités ont fait savoir à quelque 230 Érythréens qui se trouvaient dans le centre de détention de Misratah, situé à 200 kilomètres à l’est de Tripoli, qu’ils allaient prendre un avion à destination de l’Italie le jour même, en vue de leur réinstallation. On leur a demandé de se préparer pour des examens médicaux et un transfert vers l’aéroport. Ce n’était toutefois qu’une ruse et les autorités avaient l’intention de renvoyer de force ces Érythréens dans leur pays. À la connaissance d’Amnesty International, aucun détenu n’avait été renvoyé de force à la fin de l’année, de toute évidence grâce à l’intervention du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Beaucoup avaient semble-t-il fui l’Érythrée pour chercher asile à l’étranger.

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