Israël. L’impunité est accordée à des policiers ayant tué illégalement des manifestants

Déclaration publique

MDE 15/005/2008

Amnesty International est vivement préoccupée par la décision prise le 27 janvier par le procureur général d’Israël, Menachem Mazuz, de ne pas poursuivre les policiers qui ont abattu 13 manifestants au début du mois d’octobre 2000. Douze Arabes israéliens et un Palestinien avaient été tués par balles alors qu’ils manifestaient pour protester contre l’homicide de plusieurs Palestiniens par les forces de sécurité israéliennes à Jérusalem, en Cisjordanie et dans la bande de Gaza au début de ce qui a été nommé ensuite l’Intifada.

L’avis du procureur général rendu public le 27 janvier 2008 entérine la décision de clore toute enquête sur cette affaire que le département de la police judiciaire du ministère de la Justice avait prise en septembre 2005. La décision du département de la police judiciaire et l’avis du procureur général ne tiennent pas compte des conclusions de la Commission Orr qu’Ehud Barak, alors Premier ministre, avait mise en place pour enquêter sur les circonstances entourant les homicides dont avaient été victimes les manifestants en octobre 2000. Ils illustrent l’impunité systématiquement accordée par les autorités israéliennes aux membres des forces de sécurité faisant un usage excessif de la force meurtrière, en violation des normes internationales et de l’obligation qu’a Israël aux termes du droit international de respecter le droit à la vie.

À la fin de ses travaux, en septembre 2003, la commission présidée par le juge Orr avait conclu que dans plusieurs épisodes qu’elle avait examinés la réaction de la police avait été excessive compte tenu du fait qu’il n’y avait pas eu de véritable danger nécessitant le recours à la force meurtrière. Elle constatait l’escalade des moyens utilisés par la police, allant dans certains cas jusqu’à l’utilisation de balles réelles, en réaction quasi immédiate au fait qu’un de ses agents ou chefs avait été blessé par un jet de pierres de la foule récalcitrante (paragraphes 44 à 47 du rapport de la commission).

Une délégation d’Amnesty International s’était rendue quelques jours après les événements là où avaient eu lieu plusieurs des fusillades. La délégation, dont faisait partie Stephen Males, ancien policier expérimenté du Royaume-Uni et spécialiste des opérations de maintien de l’ordre à risque, avait conclu que la police israélienne avait eu recours à une force excessive en utilisant des balles réelles alors que ni la vie des policiers ni celle d’autres personnes n’était en grand danger, et qu’elle avait tué illégalement des manifestants. Amnesty International a également eu connaissance de faits attestant que les forces de sécurité israéliennes avaient gêné les secours en direction des blessés.

Rien n’indiquait que les manifestants abattus aient utilisé une arme à feu ou mis en danger de quelque façon que ce soit la vie des policiers bien équipés et protégés, même si certains manifestants auraient essayé de fabriquer des cocktails Molotov et si nombre d’entre eux avaient jeté des pierres. Équipées de boucliers antiémeutes et stationnées dans des abris à distance des manifestants, les forces israéliennes avaient été en permanence bien protégées. La police avait en général eu recours à des mesures extrêmes de type militaire plutôt qu’à des méthodes de maintien de l’ordre destinées à protéger les vies humaines. Bien que la police ait eu à sa disposition plusieurs moyens non meurtriers de disperser la foule, sa réaction avait rapidement franchi tous les paliers pour atteindre celui du recours aux armes meurtrières – balles en métal recouvertes de plastique et balles réelles. Comme l’a souligné Stephen Males : « Il s’agit là de méthodes de quelqu’un visant à se débarrasser d’un ennemi plutôt qu’à rétablir l’ordre ».

Dans d’autres circonstances, la police israélienne a montré qu’elle était capable de disperser des manifestations violentes sans tirer à balles réelles sur la foule. Elle a su faire face à plusieurs manifestations violentes de groupes juifs, comme celles organisées par les juifs ultra orthodoxes en juillet et août 1999 à Jérusalem, sans tirer à balles réelles ni même à balles en caoutchouc contre ces manifestants, et en privilégiant le recours à des moyens non meurtriers pour les disperser.

Amnesty International demande une nouvelle fois aux autorités israéliennes de veiller à ce que les membres des forces de sécurité soupçonnés d’être responsables d’une utilisation excessive de la force ayant donné lieu à des homicides illégaux soient jugés dans le respect des normes internationales d’équité ; elle leur demande de faire en sorte que des réparations soient accordées aux familles des victimes, y compris sous forme d’indemnités.

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